Le 2 juillet 2025, le ministère tunisien de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche a publié un communiqué officiel mettant en garde les éleveurs contre l’entérotoxémie, une maladie bactérienne aiguë qui affecte les ruminants, notamment les bovins, ovins et caprins. Connue localement sous le nom de « boumrirra », cette pathologie est redoutée pour sa capacité à provoquer la mort subite des animaux sans signes cliniques préalables.
Cette alerte intervient dans un contexte sensible : la période post-récolte, où les troupeaux sont souvent remis au pâturage, coïncide avec des changements brusques dans le régime alimentaire des animaux , un facteur déclencheur majeur de la maladie.
Comprendre l’entérotoxémie : causes, bactéries et facteurs déclenchants
L’entérotoxémie est une maladie provoquée par la prolifération anormale de bactéries du genre Clostridium, en particulier Clostridium perfringens de type D, dans l’intestin des ruminants. Bien que ces bactéries soient naturellement présentes en faible quantité dans le tube digestif, elles peuvent se multiplier de façon explosive lorsque l’équilibre intestinal est perturbé. Ce déséquilibre survient généralement à la suite d’un changement brutal de la ration alimentaire notamment le passage à une alimentation plus riche en glucides ou en protéines —, d’une mise au pâturage sans transition progressive, d’un stress thermique ou environnemental, ou encore d’un parasitisme intestinal mal maîtrisé. Les toxines puissantes produites par ces bactéries franchissent alors la paroi intestinale, pénètrent dans la circulation sanguine et provoquent des lésions graves, souvent irréversibles, au niveau du foie, des reins et du cerveau. L’évolution de la maladie est extrêmement rapide, et la mort peut survenir en moins de 24 heures, parfois sans signes cliniques préalables.
Régions à risque en Tunisie et période critique de contamination
Bien que le ministère n’ait pas précisé de zones géographiques précises touchées en 2025, les régions à forte densité d’élevage comme le Kef, Siliana, Kairouan, Béja ou encore Sidi Bouzid sont historiquement plus exposées, notamment en période de transition alimentaire post-récolte. La vigilance est donc de mise entre juin et août, période critique où les animaux passent des aliments concentrés à une herbe fraîche ou à des résidus de culture.
Symptômes de l’entérotoxémie : comment reconnaître la maladie chez les ruminants
Dans sa forme suraiguë, l’entérotoxémie se manifeste de manière foudroyante, ne laissant que très peu de signes avant-coureurs. Les animaux atteints sont souvent retrouvés morts sans avoir présenté de symptômes visibles, ce qui rend la détection particulièrement difficile. Dans les formes aiguës, certains signes cliniques peuvent toutefois être observés, tels qu’une léthargie marquée, une fièvre élevée, des douleurs abdominales, une diarrhée parfois hémorragique, ainsi que des convulsions ou d’autres troubles neurologiques. Le diagnostic repose principalement sur l’autopsie et l’analyse bactériologique des tissus, mais la progression rapide de la maladie rend toute tentative de traitement généralement inefficace, soulignant l’importance cruciale de la prévention
Prévention de l’entérotoxémie : bonnes pratiques pour protéger les troupeaux
Le ministère de l’Agriculture tient à rappeler que l’entérotoxémie n’est pas une maladie contagieuse et qu’elle ne présente aucun risque de transmission à l’homme. La lutte contre cette pathologie repose donc exclusivement sur une prévention rigoureuse, centrée sur la gestion de l’alimentation et de la santé du troupeau. Parmi les mesures recommandées, la vaccination préventive joue un rôle clé : elle doit être administrée au moins un mois avant tout changement de régime alimentaire afin de permettre aux animaux de développer une immunité efficace contre les toxines bactériennes. Il est également essentiel d’assurer une transition alimentaire progressive, en évitant les modifications brusques de la ration, notamment lors du passage au pâturage. L’équilibre nutritionnel doit être soigneusement respecté, en veillant à la qualité et à la proportion des aliments énergétiques distribués. Par ailleurs, une vermifugation régulière est indispensable pour limiter le parasitisme intestinal, facteur aggravant des déséquilibres digestifs. Enfin, une surveillance vétérinaire attentive est fortement conseillée : tout symptôme suspect doit conduire à une consultation immédiate, et l’usage d’antibiotiques ne doit jamais se faire sans prescription.
Mobilisation collective : rôle des éleveurs, vétérinaires et autorités agricoles
Le ministère appelle à une mobilisation de tous les acteurs de la filière : éleveurs, vétérinaires, techniciens agricoles et services régionaux. Des lignes directes ont été mises en place pour signaler les cas suspects et obtenir un accompagnement technique. Dans un contexte où la filière animale joue un rôle crucial dans la sécurité alimentaire nationale, la prévention de l’entérotoxémie est un enjeu de santé animale et de durabilité économique. La campagne de sensibilisation lancée en juillet 2025 vise à éviter des pertes massives, comme celles enregistrées lors d’épisodes similaires dans les années précédentes.