La grenade tunisienne, fruit emblématique du terroir méditerranéen, connaît une campagne 2025 marquée par des défis climatiques, une baisse modérée de la production, mais aussi des efforts soutenus de valorisation et de promotion à l’échelle nationale et internationale. Ce superaliment, prisé pour ses vertus antioxydantes, représente un pilier économique pour plusieurs régions du pays.
Une culture ancestrale en pleine expansion
La culture du grenadier en Tunisie remonte à l’époque phénicienne. La Tunisie figure parmi les dix premiers producteurs mondiaux de grenades, représentant environ 3 % de l’offre globale. La superficie totale consacrée à cette culture atteint 13 500 hectares, répartis principalement entre les gouvernorats de Gabès (3 000 ha), Kairouan (2 340 ha) et Béja (1 500 ha) dont 1 250 hectares sont concentrés à Testour et Slouguia, sur les rives de l’oued Medjerda., avec des extensions dans les régions de Sousse, Ariana, Nabeul, Ben Arous et Mahdia.
Baisse de la production à Testour : 15 000 tonnes en 2025
Le gouvernorat de Béja, est l’un des plus grands bassins de production de grenade en Tunisie. En 2025, la récolte y est estimée à 15 000 tonnes, dont 12 000 tonnes proviennent de Testour elle-même. Ce chiffre marque un recul de 4 000 tonnes par rapport à la campagne 2024, qui avait atteint 19 000 tonnes. Cette baisse est principalement attribuée à des températures élevées durant la floraison, ainsi qu’à la présence de maladies et de parasites. Malgré cette diminution, les perspectives restent positives grâce à l’arrivée de pluies tardives qui devraient améliorer la qualité des variétés locales telles que « Guebsi », « Ettounsi » et « Chemlali ».
Défis logistiques et commerciaux persistants
Les producteurs de grenades à Testour, ainsi que dans d’autres régions de Tunisie, sont confrontés à une série de défis structurels qui entravent le bon déroulement de la campagne agricole. La commercialisation des fruits reste particulièrement difficile : de nombreux agriculteurs peinent à écouler leur production, que ce soit sur les marchés locaux ou à l’international, en raison d’un manque de circuits de distribution efficaces et d’une faible valorisation du produit. À cela s’ajoute une pénurie de main-d’œuvre qualifiée pour la cueillette, aggravée par des coûts élevés qui rendent la récolte plus complexe et moins rentable. Par ailleurs, l’absence d’infrastructures adaptées, notamment de chambres froides pour la conservation des grenades, limite fortement les possibilités de stockage et de prolongation de la durée de vie du fruit après la récolte. Face à ces contraintes, les acteurs de la filière appellent à une ouverture accrue vers de nouveaux marchés d’exportation, ainsi qu’à la mise en place de solutions logistiques modernes et adaptées, afin de soutenir la compétitivité du secteur et garantir une meilleure valorisation de la production nationale
Exportations : une croissance timide mais prometteuse
Les exportations tunisiennes de grenades ont plus que doublé au cours des quatre dernières années, mais elles ne représentent encore que moins de 10 % de la production nationale. La Libye absorbe à elle seule plus de 85 % des exportations, suivie par l’Italie et la France, qui restent des marchés secondaires. Pour améliorer sa position sur le marché international, la Tunisie doit renforcer sa compétitivité en matière de productivité, de logistique, de normes de qualité et de marketing. L’adoption de labels de qualité pourrait jouer un rôle stratégique dans cette démarche.
Valorisation et transformation : un levier économique
La grenade tunisienne connaît une valorisation croissante grâce à son intégration dans les secteurs de la transformation agroalimentaire et cosmétique. Ce fruit, riche en antioxydants et apprécié pour ses propriétés nutritionnelles, entre désormais dans la composition de divers produits tels que les jus, sirops et confitures, les huiles extraites de ses pépins, les poudres destinées aux compléments alimentaires, ainsi que les soins cosmétiques naturels. Cette diversification industrielle permet non seulement d’élargir les débouchés commerciaux, mais aussi d’augmenter significativement la valeur ajoutée du fruit sur les marchés local et international. Par ailleurs, la grenade occupe une place de choix dans la culture tunisienne, notamment à travers les festivals annuels organisés à Gabès et Testour, qui célèbrent ce fruit emblématique du terroir. Elle est également très présente dans la gastronomie régionale, où elle enrichit de nombreux plats traditionnels et desserts. Ces manifestations culturelles et culinaires contribuent à renforcer l’identité territoriale des régions productrices et à promouvoir la grenade tunisienne auprès du grand public.
Conclusion : une filière stratégique à fort potentiel
La campagne des grenades 2025 en Tunisie, bien que marquée par une baisse de production à Testour, confirme le rôle stratégique de cette filière dans l’agriculture tunisienne. Avec une superficie cultivée de 13 500 hectares et une production nationale avoisinant les 100 000 tonnes, la grenade tunisienne dispose d’un potentiel considérable pour se positionner sur les marchés internationaux. Les efforts de valorisation, de transformation et de promotion, associés à une meilleure organisation logistique et commerciale, pourraient permettre à la Tunisie de franchir un cap décisif dans les années à venir.