L’agrivoltaïsme, ou agro-photovoltaïsme, désigne l’intégration de panneaux solaires sur des terres agricoles afin de produire simultanément de l’électricité et des cultures. Cette approche permet de concilier transition énergétique et résilience agricole, en apportant des bénéfices concrets : réduction de l’évapotranspiration, protection contre les stress thermiques, amélioration du rendement agricole, et diversification des revenus des agriculteurs. Déjà expérimenté avec succès dans plusieurs pays comme la France, le Japon, l’Allemagne ou la Chine, l’agrivoltaïsme s’impose comme une solution stratégique face aux effets du changement climatique. En Chine, par exemple, une centrale agrivoltaïque de 2,2 GW installée en 2021 dans la région de Qinghai Gonghe sur 609 km² a permis de réduire la vitesse du vent de 40 %, de faire baisser la température ambiante de 0,5 °C et d’augmenter l’humidité de 2 %, contribuant ainsi à restaurer la biodiversité et à lutter contre la désertification.

Tunisie : lancement officiel du premier projet pilote agrivoltaïque en 2025

En septembre 2025, la Tunisie a officiellement lancé sa première expérience d’agrivoltaïsme, portée par l’Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie (ANME). Cette initiative s’inscrit dans le cadre d’un appel à projets publié en août 2025, visant à sélectionner des démonstrateurs capables de tester différentes configurations techniques et agronomiques. Le projet pilote retenu est celui de l’Institut des Régions Arides (IRA), situé à Chenchou, dans la délégation d’El-Hamma (gouvernorat de Gabès). Ce site expérimental bénéficiera d’une installation photovoltaïque adaptée aux conditions climatiques du Sud tunisien, avec des panneaux inclinables et amovibles permettant de moduler l’ombrage selon les besoins des cultures.

Quels bénéfices pour les agriculteurs ? Rendement, irrigation, énergie et revenus

L’expérimentation agrivoltaïque initiée en Tunisie vise avant tout à démontrer les bénéfices concrets que cette technologie peut apporter aux activités agricoles et à la transition énergétique nationale. Plusieurs axes d’évaluation ont été définis pour mesurer l’impact du dispositif. Parmi eux, l’amélioration des rendements agricoles grâce à un ombrage modulé figure en première ligne, notamment pour les cultures sensibles aux stress thermiques. La réduction des besoins en irrigation constitue également un enjeu majeur : des études internationales ont montré que certaines cultures, comme la laitue, peuvent économiser jusqu’à 40 % d’eau sous panneaux solaires. Le bien-être animal est un autre critère observé, en particulier durant les périodes de forte chaleur, où l’ombrage peut jouer un rôle protecteur. Sur le plan énergétique, l’installation vise à diminuer la facture des exploitations agricoles tout en permettant, dans certains cas, la revente de l’électricité excédentaire, offrant ainsi une source de revenus complémentaire. Enfin, l’Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie (ANME) prévoit d’analyser l’impact global de ces projets sur la résilience des systèmes agricoles face aux aléas climatiques, sur l’amélioration des revenus des agriculteurs, et sur la contribution à l’atteinte des objectifs nationaux en matière de transition énergétique.

Expertise tunisienne et potentiel agronomique : un socle pour l’innovation rurale

La Tunisie dispose d’un double atout : une expertise croissante en production photovoltaïque (avec plus de 500 MW installés en 2024 selon les données de la STEG) et un savoir-faire agronomique reconnu, notamment dans les régions arides et semi-arides. L’agrivoltaïsme pourrait ainsi devenir un levier de valorisation des terres marginales, tout en renforçant la sécurité alimentaire et énergétique du pays. Le projet est soutenu par la coopération allemande (GIZ), qui a financé les études stratégiques préalables à l’appel à projets. Ces études ont permis d’identifier les zones à fort potentiel, les cultures compatibles, et les modèles économiques viables dans le contexte tunisien.

Vers une généralisation de l’agrivoltaïsme en Tunisie : perspectives et stratégies

Si les résultats de cette première phase sont concluants, l’ANME envisage une extension progressive du dispositif à d’autres régions agricoles du pays, notamment dans le Nord-Ouest et le Centre, où les enjeux de stress hydrique et de rentabilité agricole sont particulièrement aigus.

Des partenariats avec les centres de formation agricole, les coopératives et les développeurs solaires sont également envisagés pour favoriser l’appropriation locale de la technologie et la montée en compétence des acteurs du secteur.

Agrivoltaïsme en Tunisie : une opportunité stratégique pour l’agriculture et l’énergie

L’agrivoltaïsme représente une opportunité stratégique pour la Tunisie, à la croisée des chemins entre adaptation climatique, souveraineté énergétique et valorisation du secteur agricole. En s’appuyant sur des projets pilotes rigoureux, des données scientifiques et une approche territoriale, le pays pourrait devenir un pionnier régional de cette technologie.