Le lundi 9 juin 2025, aux alentours de 20h30, un incendie d’une rare intensité s’est déclaré dans l’ancienne oasis de Tozeur, au sud-ouest de la Tunisie. En quelques heures, les flammes ont ravagé une superficie de 2,5 hectares, détruisant environ 300 palmiers-dattiers, selon les premières estimations communiquées par l’Union locale des agriculteurs . Ce sinistre, survenu dans une zone agricole laissée à l’abandon, a profondément marqué les habitants de la région, attachés à ce patrimoine oasien millénaire.
L’incendie s’est propagé rapidement à travers les herbes sèches et les palmiers desséchés, alimenté par des températures dépassant les 42 °C et des vents chauds venus du désert. La zone touchée relève du Groupement de développement agricole « El Wassat », situé dans le cœur historique de l’oasis.
Une intervention rapide mais des dégâts irréversibles
Grâce à l’intervention rapide des unités de la protection civile, appuyées par les autorités locales et des volontaires, le feu a pu être maîtrisé dans la soirée même. Les voies d’accès dégagées ont permis aux camions d’intervention d’atteindre rapidement le foyer principal, évitant ainsi une propagation vers d’autres parcelles encore exploitées. Toutefois, certaines zones enclavées, mal entretenues ou envahies par la végétation, ont compliqué l’action des secours. Selon Habib Touzri, président de l’Union locale des agriculteurs, l’origine probable de l’incendie serait liée à un brûlage incontrôlé de déchets agricoles, une pratique encore courante malgré les campagnes de sensibilisation. Il a rappelé que l’absence de points d’eau fixes dans certaines zones rendait difficile l’approvisionnement des véhicules d’extinction, aggravant les risques en période estivale.
Une oasis en péril : entre abandon et vulnérabilité
L’ancienne oasis de Tozeur, classée patrimoine naturel et agricole, est aujourd’hui confrontée à une double menace : le changement climatique et la déprise agricole. De nombreuses parcelles sont laissées à l’abandon, faute de main-d’œuvre, d’eau ou de rentabilité. Cette situation favorise l’accumulation de matières inflammables et rend les incendies plus fréquents et plus destructeurs. En 2024, la région de Tozeur avait déjà enregistré cinq départs de feu, dont deux avaient nécessité l’intervention aérienne des autorités. Cette année, malgré une baisse relative du nombre d’incendies grâce aux efforts de prévention, l’ampleur du sinistre du 9 juin rappelle la fragilité extrême de ces écosystèmes oasiens.
Des appels à la vigilance et à la réhabilitation
Face à cette tragédie, les autorités locales et les organisations agricoles ont renouvelé leurs appels à la vigilance. Des campagnes de sensibilisation sont en cours dans les délégations de Tozeur, Degache et Nefta, avec l’appui de la Direction générale des forêts et de la Garde nationale. L’objectif est d’inciter les agriculteurs à éviter les brûlages à ciel ouvert, à entretenir leurs parcelles et à signaler tout départ de feu.
Par ailleurs, le ministère de l’Agriculture a annoncé le lancement d’un programme de réhabilitation des oasis anciennes, avec un budget initial de 3 millions de dinars pour l’année 2025. Ce programme prévoit la remise en culture de 100 hectares, la création de pare-feux naturels et l’installation de points d’eau fixes pour les interventions d’urgence.
Un patrimoine à préserver pour les générations futures
L’oasis de Tozeur n’est pas seulement un espace agricole : elle incarne une mémoire collective, un savoir-faire ancestral et un équilibre écologique unique. La perte de 300 palmiers représente bien plus qu’un dommage matériel : c’est une blessure symbolique pour toute une région. Alors que les températures estivales ne cessent d’augmenter et que les ressources hydriques se raréfient, la préservation des oasis devient un enjeu stratégique pour la Tunisie. Elle nécessite une mobilisation collective, une meilleure coordination entre les acteurs locaux et nationaux, et surtout une reconnaissance du rôle vital que jouent ces écosystèmes dans la lutte contre la désertification.