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lundi 13 octobre 2025
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Révision du règlement bio européen : quels impacts pour la Tunisie en 2025 ?

Depuis le 1er janvier 2025, l’Union européenne applique un nouveau règlement sur l’agriculture biologique, dans le cadre de sa stratégie “De la ferme à la table” et du Pacte vert pour l’Europe. Ce mois d’octobre marque une étape décisive avec l’entrée en vigueur de dispositions transitoires qui viennent renforcer le cadre réglementaire. Parmi les principales nouveautés figurent la certification des groupements de producteurs, désormais soumise à des exigences organisationnelles plus strictes, l’intégration des produits aquacoles et des algues dans le cadre réglementaire public, et le renforcement des contrôles tout au long de la chaîne d’approvisionnement. Ces mesures visent à garantir une concurrence équitable, à prévenir les fraudes et à renforcer la confiance des consommateurs dans le label biologique européen.

L’origine du durcissement des règles bio européennes

L’origine de ces nouvelles restrictions réside dans la volonté de l’Union européenne de répondre à la croissance rapide du secteur biologique, tout en garantissant une concurrence équitable entre les producteurs européens et ceux des pays tiers. Le précédent système, basé sur des équivalences simplifiées, avait montré ses limites en matière de contrôle et de transparence. Des cas de fraude et de non-conformité ont été relevés, notamment dans les importations, ce qui a conduit à une révision profonde du cadre réglementaire. Le nouveau règlement vise donc à renforcer la confiance des consommateurs, à simplifier les règles de production en supprimant certaines dérogations, et à imposer des standards homogènes à tous les acteurs du marché bio

La Tunisie, fournisseur clé de bio pour l’Europe

La Tunisie occupe une place stratégique dans le commerce des produits biologiques avec l’Union européenne. Elle exporte chaque année des dizaines de milliers de tonnes de produits certifiés bio, notamment de l’huile d’olive, des dattes, des plantes médicinales et des agrumes. Ce secteur représente un pilier de l’agriculture tunisienne, avec 234 000 hectares cultivés selon les normes biologiques en 2024, dont plus de 144 000 hectares dédiés à l’olivier biologique, selon les données du Centre Technique de l’Agriculture Biologique (CTAB). Cette croissance s’accompagne d’une consolidation des pratiques, d’une meilleure traçabilité et d’un encadrement technique renforcé. Toutefois, les nouvelles règles européennes imposent aux producteurs tunisiens de se conformer aux mêmes normes que les agriculteurs européens, sans possibilité de dérogation. Cela implique une adaptation rapide des systèmes de certification, de traçabilité et de contrôle qualité pour maintenir l’accès au marché européen.

Des défis techniques et économiques pour les producteurs tunisiens

Les nouvelles exigences posent plusieurs défis majeurs pour les producteurs tunisiens. La certification des groupements de producteurs, par exemple, nécessite une réorganisation juridique et administrative complexe, particulièrement difficile pour les petits exploitants. Les coûts liés aux audits plus fréquents, aux contrôles renforcés et aux ajustements techniques risquent d’alourdir les charges financières des opérateurs. En cas de non-conformité, les produits peuvent être rejetés à l’importation, entraînant des pertes économiques significatives. Ces contraintes interviennent dans un contexte déjà tendu, marqué par l’inflation, la pression sur les prix et une baisse de la consommation bio en Europe.

Une opportunité de montée en gamme pour la Tunisie

Malgré les obstacles, cette réforme peut être perçue comme une opportunité pour la Tunisie de renforcer la qualité et la compétitivité de son offre biologique. L’alignement sur les standards européens permettrait d’améliorer les pratiques agricoles, de valoriser l’origine méditerranéenne des produits tunisiens et de mieux répondre aux attentes des consommateurs internationaux. Par ailleurs, la diversification des marchés vers l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie pourrait réduire la dépendance à l’Europe et ouvrir de nouveaux débouchés. En misant sur la montée en gamme, la Tunisie peut transformer cette contrainte réglementaire en levier de développement durable.

Le rôle des institutions tunisiennes dans l’accompagnement

Pour réussir cette transition, les institutions tunisiennes doivent jouer un rôle central. L’Agence de Promotion des Investissements Agricoles (APIA) et le Ministère de l’Agriculture sont appelés à soutenir les producteurs dans leur mise à niveau réglementaire. Le Centre Technique de l’Agriculture Biologique (CTAB) peut renforcer ses programmes de formation, de recherche et d’appui technique. Les organismes certificateurs doivent garantir une conformité stricte aux nouvelles exigences européennes tout en restant accessibles aux petits producteurs. Enfin, un dialogue institutionnel renforcé avec les autorités européennes est essentiel pour anticiper les évolutions réglementaires et défendre les intérêts du secteur bio tunisien.

Conclusion : vigilance, adaptation et stratégie

L’entrée en vigueur des nouvelles règles européennes sur l’agriculture biologique en octobre 2025 représente un tournant pour les exportateurs tunisiens. Si le durcissement des normes soulève des inquiétudes légitimes, il peut aussi stimuler une montée en gamme du secteur bio tunisien. Une stratégie proactive, fondée sur l’innovation, la coopération institutionnelle et la diversification des marchés, sera essentielle pour préserver la compétitivité de la Tunisie dans ce secteur en pleine mutation. La vigilance et l’anticipation seront les clés pour transformer cette réforme en opportunité durable.

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